Surpoids et Survie - Non au régime restrictif!
- bgiraudeau
- 12 avr.
- 7 min de lecture
Dernière mise à jour : il y a 6 jours

Les troubles alimentaires
Ce post a pour vocation de remettre l'église au centre du village, sur la question du surpoids et de toute restriction alimentaire.
Comme tentative de solution aggravante, la restriction remporte la palme!
And the winner is : " Je veux maigrir donc je me prive"
Cette logique, totalement conforme à un certain bon sens, a pour conséquence d'enclencher une privation et d'envoyer à votre cerveau reptilien le message de famine.
La réponse ou feedback cher à notre modèle de Palo Alto, ne va pas se faire attendre très longtemps: régime restrictif = tentative de solution aggravante = compulsion
Combien d'adolescentes (mais aussi de plus en plus d'adolescents également), ont commencé par des régimes pour perdre quelques kilos sans savoir qu'elles déclenchaient cette boucle infernale.
Je me prive et donc je me prépare à stocker des réserves comme pour faire face à une famine; Sans compter que la privation entraîne des désirs compulsifs. Finalement, je provoque ce que je crains le plus: prendre du poids Comme le dit très stratégiquement Giorgio Nardone dans son ouvrage Manger beaucoup, à la folie, pas du tout:
"Un aliment que je m'interdis devient irrésistible, un aliment que je m'autorise, je peux m'en passer."

Pour l'heure, c'est au travers des programmes archaïques de survie que je souhaite évoquer cette problématique.
Le danger de réduire le surpoids à l'alimentation est de créer un cercle vicieux et de déréguler le métabolisme.
En effet, on a trop vite fait de réduire systématiquement le surpoids à l'alimentation, et d'en restreindre ainsi le champ thérapeutique. Certes, si l'alimentation est au coeur du problème, elle n'en a pas pour autant l'exclusivité.
Le problème de surpoids est en effet multifactoriel ( y compris dans la différence biologique hommes et femmes ), car en plus des troubles alimentaires, viennent se surajouter les facteurs d'hérédité, de métabolisme, de l'histoire de chacun, mais aussi de programmes archaïques de survie.
Dame nature et la survie
J'ajouterai que la programmation de la survie reste la première préoccupation de notre cerveau. S'entend notre cerveau reptilien, le plus primaire dans son apparition au cours de l'évolution des espèces. Il assure la satisfaction de nos besoins fondamentaux au travers de comportements très archaïques et inconscients, visant également à conserver l'équilibre homéostasique de notre système vivant. Nous verrons au travers de ces programmes archaïques en quoi le surpoids est une solution du cerveau reptilien, et que restreindre n'a pas d'effet sinon à renforcer et réactiver le dit programme.
Je m'en explique: qui dit survie dit adaptation à son environnement, défense du territoire, protection au sein du clan, accouplement et reproduction, recherche de nourriture avec parfois selon la saison et l'environnement plus ou moins hostile, l'obligation de stocker des graisses pour tenir le coup le plus longtemps possible.
C'est ainsi que plusieurs stratégies de survie nous sont très reconnaissables chez nos amis les bêtes, et toujours engrammé dans notre cerveau.
1) Fuir au plus vite ou disparaître en se fondant au décor, permet d'échapper au prédateur.
2) Combattre, s'il n'est pas possible de fuir. Cela peut revenir à dissuader les prédateurs en les impressionnant, afin d'éviter un combat dont l'issue certaine chez les animaux sauvages n'est autre que la mort.
3) S'il n'est pas possible de fuir, ni de combattre, c'est l'état de sidération qui anesthésie:
La girafe qui sait que le lion va la dévorer, entre en sidération rendant ainsi sa mort plus "douce".
Dame Nature est formidablement bien équipée pour cela. Voici quelques exemples illustrés de défense du territoire et de protection vitale face aux prédateurs.

Ce chat qui fait le gros dos, hérisse ses poils, les pupilles dilatées, signifiant qu'un autre chat (ou humain) vient de tenter de pénétrer sur son territoire et qu'il est prêt à le défendre. C'est notamment en décuplant le volume de sa silhouette, et en montrant des crocs et des griffes, qu'il tente d'impressionner et de dissuader l'adversaire d'aller sur son territoire. C'est le plus fort et le plus dominant qui imposera la soumission au plus vulnérable.


S'adapter et survivre dans un environnement hostile, exigent une robustesse et une endurance à toute épreuve; citons le Yack en Himalaya, animal robuste et puissant, à la longue toison épaisse le protégeant du froid et des intempéries, pour ne pas parler du chameau dans le désert, des rennes dans la Toundra, des phoques et de leur précieuse graisse...
Sélection, séduction et parades amoureuses répondent à des besoins différents chez le mâle et la femelle. Cette sélection permet une reproduction efficace et vitale à la survie de chaque espèce. Chez le mâle, la survie le pousse à féconder le plus grand nombre de femelles; Ces dernières, quant à elles, vont repérer le mâle le plus robuste et le plus protecteur pour leurs petits. Le mâle n'a plus qu'à gonfler son poitrail, ou à faire la roue, les femelles à paraître le plus fertile possible.
Et les humains dans tout ça ?
Etre humain oui, mais nous restons avant tout des êtres régis par notre biologie, visant à nous maintenir constamment en vie. Pour cela et selon le professeur Henri Laborit:
"Un être humain est une mémoire qui communique et agit." Pour évoluer, nous avons obligatoirement dû mémoriser tous ces programmes archaïques de survie, et nous devons toujours nous nourrir, nous reproduire, nous déplacer pour conquérir de nouveaux territoires, faire face au danger qui menace ce même territoire, et toujours échapper au "prédateur". Ce sont nos pulsions de survie, qui ne paraissent pas toujours logiques et cohérentes à notre cerveau limbique, siège de nos émotions ainsi qu'à notre néocortex, siège de notre langage et de notre pensée. Dans l'Eloge de la fuite, Henri Laborit exprime métaphoriquement et admirablement bien, nos trois comportements de survie: La fuite, le combat et la sidération. A noter que si nous ne pouvons, ni fuir, ni combattre nous nous retrouvons dans l'inhibition de l'action, sans pouvoir bouger, et ainsi attendre sous une extrême tension que le danger nous tombe dessus; c'est l'angoisse et le surstress qui nous font tomber dans le mal-être, puis dans la maladie. Oui mais les problèmes de poids dans tout cela? J'y arrive...
Faire face aux conflits en prenant du poids
Nos conflits et nos peurs ne sont pas si éloignés de ceux des animaux: nous avons, engrammés dans notre mémoire, qu'être seul dans la nature équivaut à une mort certaine, ou du moins nous expose à de grands dangers.
Ainsi, les surchages pondérales sont des solutions de survie, principalement dans les syndromes d'abandon ou de séparation et de protection de la peur d'un prédateur.
Pour nous humains, il ne fait pas de différence entre un réel abandon, comme un accouchement sous X, et un ressenti d'avoir été abandonné, délaissé ou ignoré. Cela reste la réalité de la personne qui souffre.
Une séparation peut se vivre comme la perte brutale d'un être cher et protecteur, ou d'un éloignement. Etre seul au monde, sans famille, sans amis, sans travail, en marge de la société, ou ressenti comme tel.
Dans tous les cas, la personne se sent en grand danger, souvent bien plus inconsciemment qu'elle ne le soupçonne; Comment un petit d'humain (tout comme d'animal), peut-il survivre loin de sa mère, de son père et de la présence du clan protecteur de la famille, amis, et de toute représentation symbolique du clan?
Difficilement s'entend, avec la peur de manquer de nourriture, de la sécurité d'un toit, de la protection d'un clan...
On retrouve aussi les solitudes affectives, amicales et sociales qui se caractérisent au travers d'un deuil, d'un divorce ou d'un chomâge. Tout ce qui crée un sentiment d'insécurité vitale, peut pousser la personne à faire des réserves, pour tenir le coup le plus longtemps possible, forcir sa silhouette pour faire face au danger, enfler comme une "grenouille", et se protéger de toute agression extérieure à l'aide de capitons graisseux protecteurs...Dans tous les cas, il faut être fort et cela résulte plus d'un comportement masculin (Yang) qui consiste à lutter, mais qui ne signifie pas qu'on le retrouve exclusivement chez les hommes, loin de là.
Beaucoup de femmes sont plus yang que yin.
Pousser la personne à perdre du poids, alors qu'il est une solution archaïque de survie de son cerveau reptilien, paraît bien être une hérésie, et de surcroît un facteur aggravant .
Non seulement, ce poids sera retrouvé et amplifié, mais la personne se sentira de plus en plus en danger, augmentant encore son mal-être et l'intensité de son conflit.
Le cerveau reptilien n'a pas d'états d'âme et surtout pas de sens esthétique! C'est un combat stérile que se livrent le néocortex, le cerveau limbique et reptilien; les enjeux sont incompatibles entre la survie, le désir d'être heureux, l'esthétisme et les diktats de la société.
Avant de changer quoique ce soit à l'alimentation de la personne, il sera primordial de l'accompagner à identifier ses peurs et ses émotions, ainsi que les programmes archaïques de survie mis en place, afin de la faire cheminer.
Quant au comportement plus Yin de certaines personnes, elles traverseront les épreuves au travers de la fuite (nécessité de rester très leste et agile), pour parfois même tendre à disparaître et échapper ainsi au danger et à toute prédation. Celles-là même qui maigrissent à vue d'oeil dés qu'elles sont stressées, et irritent tellement les autres qui grossissent, elles, à la simple vue d'un gâteau.
Une piste à ne pas négliger dans les cas d'anorexie, maladie plus spécifiquement féminine; les "femelles" peuvent perdre tout attribut féminin (seins, fesses, cycle menstruel, séduction) au travers de l'anorexie, échappant ainsi au prédateur qui reste encore aujourd'hui le mâle.
Que dire du viol? Toujours une arme de guerre et ce depuis la nuit des temps , dénoncé et sorti de l'omerta avec le mouvement #Metoo. Explorer ce programme archaïque de survie dans tous les cas d'anorexie est un levier puissant.
Comme on le voit, les problèmes de poids ne sont pas qu'affaire d'alimentation et demandent une synergie de processus thérapeutiques qui agiront à différents niveaux de la personne.
"Tant qu’on n’aura pas diffusé très largement à travers les hommes de cette planète la façon dont fonctionne leur cerveau, la façon dont ils l’utilisent et tant que l’on n’aura pas dit que jusqu’ici cela a toujours été pour dominer l’autre, il y a peu de chance qu’il y ait quoi que ce soit qui change." Henri Laborit
A voir dans un prochain post comment réguler son métabolisme, stopper les compulsions et s'alléger du poids avec le modèle de l'Ecole de Palo Alto.
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